Qu'est-ce (idéalement) qu'un résumé ?

Il semble communément acquis - en sciences humaines et sociales ou ailleurs - que le résumé se doit de coller au plus près de l'âme du texte, dans une mise en perspective qui doit tendre vers zéro. Le résumé se distingue alors de la synthèse, qui autorise le lecteur à exprimer son point de vue pour faire apparaître les points forts et les points faibles de la prose de l'auteur. Tout deux ont cependant pour principe commun la réécriture du texte dans une optique de réduction sévère.

Ceci étant posé, on pourrait penser - naïvement, c'est-à-dire comme moi - que l'essentiel est dit. Les faits ne m'ont pas donné raison, la preuve en est cette dernière séance avec un de mes groupes de TD. La situation est la suivante : les étudiants avaient reçu de moi cette simple consigne (exprimée ci-dessus) pour un exercice à rendre à la séance suivante, et - entre temps - avaient appris de la part d'un autre enseignant une technique bien plus élaborée. Selon cette dernière, un résumé doit être écrit comme si l'auteur l'avait lui-même écrit, c'est-à-dire en adoptant le même positionnement dans le récit (quand j'écris le résumé, je suis l'auteur). Il faut en préserver la structuration des parties au point de les faire identiquement apparaître ; et même plus, il s'agit d'en respecter la proportion respective (en nombre de ligne sur la totalité du texte). L'objectif est le suivant : permettre à toute personne n'ayant pas lu le texte original d'en avoir une totale compréhension.

L'avantage d'une telle approche est que, avec des consignes aussi précises quant à la forme finale du résumé, on facilite grandement sa rédaction. Pourtant, je n'adhère pas tout à fait, la finalité d'un résumé serait à mon sens plutôt de permettre à qui a déjà lu le texte d'en réactualiser dans sa mémoire son contenu, voire à qui ne l'a pas encore lu d'en avoir une présentation. Concernant la question de la compréhension, j'aurai tendance à inviter plutôt le lecteur à lire le texte d'origine plutôt qu'à lui mâcher le travail. Parce qu'une méthode comme décrite ci-dessus, qui tente d'obtenir une version tout aussi compréhensible mais réduite du texte d'origine, sous-entend que le propos pourrait être tenu de façon plus concise. En d'autres termes, on remet ainsi en question le travail de l'auteur. Comment cela est-il défendable ?

J'incite pour ma part les étudiants à mettre en évidence dans le résumé le cheminement argumentaire de l'auteur, ou pourrait-on dire aussi le fil conducteur du texte. Pour cela je les invite à titrer chacun des paragraphes pour élaborer un plan détaillé, à partir duquel ils seront en mesure de reconstituer facilement la succession chronologique de la pensée de l'auteur. Cela induit de ne pas hésiter à sabrer une bonne partie du contenu original, afin - comme je leur leur dit - d'en extraire la substance essentielle. Et c'est d'ailleurs tout l'intérêt de l'exercice : la sélection de l'information pertinente.

J'explique en effet que dans la rédaction d'un texte scientifique, l'auteur communique un message, et qu'à ce titre il tente de nous convaincre de son point de vue. En ce sens, il va prendre du temps pour expliquer le moins évident, et passera naturellement plus vite sur les notions communes. Est-ce pour autant que le plus simple à comprendre est le moins important ? Bien sûr que non, et c'est ce qui justifie que l'on ne reproduise pas dans le résumé la structuration et la proportion de chacune des parties.

Il n'en reste pas moins que ce sont deux conceptions bien différentes de l'exercice, même si elle se fondent sur le même principe premier. L'une vaut-elle mieux que l'autre ? Et si oui, à quel titre ? Existe-t-il des écrits à ce sujet pour nourrir la réflexion ? Et sinon - question subsidiaire - comment expliquer cela à des étudiants (en sciences de l'information et de la communication qui plus est) quelque peu dubitatifs (on les comprends) ?

Crédit photo : Snip, Snip de Bill on Capitol Hill.

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Publié par archi02 : 28