Débats sur la LOPPSI : lettre (ouverte) aux députés

Mesdames et messieurs les députés,

Le projet LOPPSI a été planifié les 9, 10 et 11 février à l’Assemblée Nationale.

Je n’ai pas lu tout le projet de loi (n’étant pas compétent sur le contenu de tous les articles), mais j’ai lu avec attention ceux concernant Internet (2, 3, 4 et 23), que j’avais analysés l’année dernière : loppsi.pdf.

Je souhaiterais en particulier attirer votre attention sur le dispositif principal (l’article 4) qui prétend « protéger les internautes contre les images de pornographie enfantine ». Pour résumer mon analyse, j’en dénonce les fondements, la mise en œuvre, l’efficacité et les dangers. Je formule également des propositions pour répondre au problème posé.

Les fondements : pour combattre la pédopornographie, il faut attaquer « à la source », à savoir ordonner le retrait des contenus et arrêter les individus qui les créent. Ce texte fait le contraire : il propose de ne pas avoir à s’embêter à arrêter les criminels et fait en sorte de pouvoir les ignorer tranquillement.

La mise en œuvre : elle porte clairement atteinte à la neutralité du net, car le filtrage serait effectué en cœur de réseau. Elle tente d’aller à l’encontre de la structure même d’Internet, et provoquera à coup sûr des sur-blocages.

L’efficacité : toutes les technologies de filtrage sont inefficaces et facilement contournables.

Les dangers : la possibilité pour le ministère de l’intérieur d’ordonner le filtrage d’une liste gardée secrète de sites est, en soi, très contestable. Cela mènera inévitablement à des dérives, comme on peut le constater dans les pays ayant mis en place un tel dispositif.

Cet article de loi présente un objectif peu pertinent (bloquer l’accès à ceux qui tomberaient sur des contenus criminels « par hasard ») plutôt que de s’attaquer au problème réel de la pédopornographie, mais en plus il y répond de manière inappropriée.

Pour contrer les réseaux de pédopornographie, il faudrait mettre plus de moyens pour remonter aux sources et arrêter les personnes concernées. Il faudrait également ordonner le retrait des images sur les serveurs, beaucoup plus efficace que le filtrage, et sans risque de sur-blocage, ce qui fonctionne très bien contrairement à ce qui est sous-entendu dans le projet de loi (voir la conclusion de mon analyse détaillée).

En plus de ces réelles mesures, on peut bien sûr envisager, en complément, de « protéger » les quelques internautes qui tomberaient malencontreusement sur des images douteuses. Pour cela, il existe une solution très simple, concrète et respectueuse des libertés : proposer aux utilisateurs un logiciel de type « contrôle parental » qui bloquerait ces contenus. Pour des non-spécialistes, la différence avec le filtrage proposé peut paraître subtile, elle est pourtant FONDAMENTALE : l’utilisateur a le contrôle sur ce qui est bloqué, les risques de sur-blocage et de dérives démocratiques sont évités, la neutralité du réseau n’est pas attaquée et l’objectif est parfaitement atteint.

N’hésitez pas à consulter également l’analyse que je fais des articles 2, 3 et 23, que je ne résume pas dans cette lettre.

En tant que citoyen, je vous invite à prendre en compte ces arguments. Si vous y adhérez, je vous propose de formuler des amendements pour les défendre. Si vous avez des doutes ou souhaitez des précisions, n’hésitez pas à me contacter. Si vous êtes en désaccord, merci de m’en indiquer les raisons.

J’espère que vous écouterez l’ensemble des personnes qui s’expriment sur le sujet (qui n’ont pas forcément le même avis que moi) afin d’agir dans l’intérêt général.

Cordialement,

EDIT : À lire également : LOPPSI : la censure d’État bientôt adoptée en France.

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