ChromeOS est-il une distribution GNU/Linux ?

Chantier collectif
Utiliser une distribution GNU/Linux, c'est pouvoir faire œuvre commune si on le souhaite !

Dans un précédent billet nous avions vus (avec l'aide de Paul Kocialkowski du projet Replicant dans les commentaires) pourquoi Android ne pouvait pas être considéré comme une distribution GNU/Linux.

Pour répondre par la négative, nous avions alors avancé un argument technique, bien commode il faut le reconnaître (spoiler : il n'y a pas de composants du projet GNU dans Android). D'ailleurs j'avais classé ce billet dans la rubrique « logiciels ». Celui-ci ressort cette fois-ci de la catégorie « libertés numériques », indiquant que l'argument ne sera pas (uniquement) technique.

Pas un système libre

Le premier point est que le système ChromeOS distribué avec les Google Chromebooks (fabriqués par les partenaires de Google) est un système d'exploitation non-libre. Contrairement au projet Chromium OS sur lequel il s'appuie, qui lui est libre, mais que Google ne distribue sur aucun matériel. On voit bien qu'il y a déjà là une première gymnastique qui n'a rien d'anodine.

Une distribution, vraiment ?

Le deuxième point que j'ai découvert ces jours-ci et qui m'a surpris, est que Chromium OS est un système GNU/Linux. C'est même un dérivé de Gentoo Linux !

Est-ce que ça en fait une distribution GNU/Linux pour autant ? Mon argument ici n'est certes pas encore tout à fait solide au moment où j'écris - il relève encore de l'intuition à ce stade -, mais il part de mon ressenti d'utilisateur d'une distribution GNU/Linux depuis des années (Ubuntu Linux puis Debian GNU/Linux) ayant pris goût à la liberté qu'elle lui confère. En fait, contrairement à mon précédent billet qui analysait ce qu'est Android, j'analyserais ici ce que permet - ou plutôt ne permet pas - Chromium OS.

Je cite la page wikipédia correspondante, tout à fait éclairante : ChromeOS, étant une version de Linux, a la capacité d'exécuter des logiciels Linux. Cependant, le concept fondamental du Chromebook est de limiter cette option, tout devant passer par le navigateur Chrome.

Ainsi, d'un point de vue pratique, mais aussi philosophique du coup, le fait que l'on n'ait pas accès à l'écosystème d'applications libres d'une distribution GNU/Linux, sa riche communauté de développeur·euses - utilisateur·rices - contributeur·rices, m'empêche de parler de distribution GNU/Linux dans le cas de Chromium OS.

Par sa décision de verrouiller Chromium OS en empêchant toute installation de logiciels de l'écosystème des distributions GNU/Linux, Google prend la décision d'exclure Chromium OS - ainsi malheureusement et surtout que ses utilisateurices - de la puissante communauté des utilisateurices des distributions GNU/Linux.

Et ainsi in fine de priver les possesseur·euses de Chromebooks de la liberté de faire partie de la communauté des libristes à un quelconque degré.

Propos finaux

Lorsque je suis passé de Microsoft Windows à Ubuntu Linux, une des choses qui m'ont sauté aux yeux et le fait d'avoir, dès l'installation, un système complet, incluant un navigateur web, un lecteur multimédia, une suite bureautique, etc.

Par ailleurs et au delà, en changeant de système d'exploitation (Windows→Ubuntu Linux→Debian GNU/Linux), j'ai pu à chaque fois conserver les mêmes logiciels libres (VLC, Firefox, LibreOffice...) et ne pas avoir à tourner le dos à leurs communautés.

Ça me fait mal aujourd'hui d'entendre dire qu'il faudrait comptabiliser les parts de marché de ChromeOS dans les parts de marché des distributions GNU/Linux et célébrer un succès commun. En terme d'empuissancement des utilisateurices, ChromeOS est un recul même sur Windows qui me permettait d'installer Firefox, VLC, LibreOffice, etc. Google, avec ses Chromebooks, retire à ses utilisateurices toute possibilité de faire partie d'une communauté politique. C'est un recul majeur, une amputation grave des libertés des utilisateurices.

Postface

Il faut reconnaître que Google, avec ses stratégies de libre-washing, nous pousse à nous interroger toujours plus loin sur les éléments garantissant la liberté des utilsateurices au fur et à mesure de ses tentatives de brouiller les limites. C'était le cas ici même en 2008 après l'annonce par Google de Chrome, un navigateur « libre », c'était le cas ici même en 2013 au sujet d'Android, un système d'exploitation Linux « libre », c'est encore le cas aujourd'hui avec ChromeOS, un système d'exploitation GNU/Linux « libre ».

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