Le droit d'auteur n'est pas destiné à rémunérer ad vitam æternam…

Le 20 novembre dernier à l'Assemblée nationale, la députée Isabelle Attard profitait de l'occasion pour tenter de faire passer un certain nombre d'amendements en faveur du domaine public.

Nous y sommes longuement revenus dans notre article : Définition positive du domaine public, on va y arriver Mme Attard !.

Nous vous proposons ci-dessous un extrait de sa toute dernière intervention, de guerre lasse, une fois tous ses amendements rejetés...

Transcription

Je voudrais préciser que le droit d'auteur n'est pas destiné à rémunérer ad vitam æternam les petits-enfants, arrière-petits-enfants et arrière-arrière-petits-enfants des auteurs et créateurs. Comme le rapporteur l'a rappelé, il a été créé, au moment de la Révolution, afin de permettre aux auteurs de vivre de leur travail et de leurs créations.

Quelles limites fixons-nous à cette rémunération ? Ce sujet important, j'espère que vous le traiterez dans le futur projet de loi sur la création et que nous aurons alors la possibilité d'en discuter. Il s'agit en effet d'une notion cruciale : aujourd'hui, certaines personnes, comme les ayants droit de Tintin, utilisent toutes les ficelles juridiques pour faire durer au maximum une période qui leur permet de se comporter comme de vrais rentiers vis-à-vis d'Hergé. Ils n'ont rien à voir avec l'auteur, ils ne l'ont jamais connu, et pourtant ils vivent aujourd'hui encore de son travail. Il s'agit, non plus de rémunérer un auteur pour ce qu'il a fait, mais de l'utilisation tout à fait abusive d'un système, en faisant tout pour allonger et allonger encore la durée de protection des droits d'auteur – nous en sommes aujourd'hui à soixante-dix ans !

Je le répète : nous voterons en faveur de ce projet de loi, même si, philosophiquement, je suis opposée à l'allongement continuel de cette durée. Peut-être les descendants de Disney nous imposeront-ils demain, via le traité TAFTA ou tout autre accord, d'aller jusqu'à 100 ans, afin de rémunérer les arrière-arrière-petits-enfants ? Je ne suis pas d'accord avec ce principe. Je pense qu'il faut revenir aux fondamentaux, tels que les avait définis Victor Hugo en 1878 : faire en sorte que les auteurs puissent vivre de leurs œuvres, et qu'ensuite celles-ci s'élèvent – et non « tombent » – dans le domaine public, afin que la création française et celle du monde entier puissent s'épanouir à nouveau, sans que l'on ait à négocier un bout de gras avec de prétendus ayants droit qui n'ont jamais connu l'auteur.

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Publié par Romaine Lubrique : 105