Application métier libres, la prochaine étape ? (Partie 2/3)

Retrouvez la première partie de cet article où je présente un exemple d’application métier libre et l’intérêt de cette approche pour le développement du logiciel libre.

Travaille équipeMutualisation de la demande

Nous sommes aujourd’hui dans l’ère de la mutualisation par l’offre. Les grands exemples sont les communautés industrielles comme la Fondation Apache ou encore OpenStack. Il s’agit de rassemblement d’entreprises technologiques qui mettent en commun leurs équipes de développement. L’inconvénient de cette démarche, c’est qu’elle aboutit souvent à la fabrication de briques qu’il faut encore assembler avec d’autres. Il est rare de trouver dans ces communautés des entreprises utilisatrices à l’exception de quelques grands groupes internationaux.

La mutualisation de la demande est le terme employé par François Elie pour décrire une troisième approche du développement des logiciels libres. Une approche dans laquelle les utilisateurs se saisissent du logiciel libre et se rassemblent pour payer les développeurs qui peuvent enfin vivre de leur code. Attention, cependant, à ne pas confondre cela avec le trop célèbre « crowfunding » qui n’est qu’une démarche de financement pour tous types de projets. Des projets qui ne sont d’ailleurs pas forcément libres ou open source.

Il s’agit ici de bâtir une démarche sur le long terme et implique donc la mise en place de structures pour rassembler les acteurs, mutualiser les besoins, les moyens et porter le ou les futurs logiciels libres métiers.

Mais les exemples concrets restent rares. il faut encore faire comprendre aux utilisateurs tout l’intérêt qu’ils peuvent trouver dans cette démarche. Il faut donc les appâter et monter des projets aptes à susciter leur intérêt et à lever leurs craintes quant au risque de partager du code avec d’autres. Une approche qui passe sûrement par les usages et non par la technologie.

SAS, GIE, Fondation, Association ?

Vient ensuite la question du statut juridique pour porter ces applications métiers. Dans le cas de Coopengo, nous avons affaire à une entreprise privée. Ce qui fait de cette dernière un éditeur de logiciel. Je ne m’étendrais pas trop sur les inconvénients de ce modèle et les questions qu’il pose : l’intérêt général représenté par les logiciels libres peut-il se marier avec celui d’intérêts privés ? Quel degré de confiance vont pouvoir accorder les entreprises utilisatrices dans cet acteur ? Comment peuvent-elles s’impliquer dans la gouvernance du logiciel ? Et au-delà de ces questions, l’instabilité que génère ce modèle sur les logiciels libres n’est plus à démontrer. Souvenons-nous de l’histoire d’OpenOffice ou MySQL

Le regroupement de sociétés autour du développement d’un logiciel n’a rien de nouveau. Depuis des années, des GIE (Groupement d’Intérêt Economique) se sont constitués autour du développement de logiciel avec plus ou moins de succès. Néanmoins l’accès au logiciel restait et reste souvent restreint à un groupe fermé. Il faut payer sa cote-part pour avoir accès au logiciel.

Côté associatif, on peut citer le cas de l’ADULLACT dont le principe fondateur est de regrouper les acteurs des administrations publiques et collectivités  locales pour mutualiser leurs moyens autour de logiciels métiers. Une sorte de GIE ouvert dans la mesure où les logiciels réalisés sont libres. Cette association s’appuie sur une forge centralisant tous les projets et un « magasin » proposant les logiciels pacagés et validés par les services techniques de la SCIC créée en mars 2006 : ADULLACT Projet. Elle assure aussi le support (payant) des logiciels libres proposés.

Je citerais aussi l’exemple de Meza|Lab en cours de développement qui s’appuie sur les usages (ou déclinaisons verticales de cas d’utilisation) du Web3D. Ceci pour attirer des entreprises et les amener à devenir mécènes de ces actions et donc à participer au développement d’outils et de contenus libres qu’elles pourront ensuite utiliser pour leurs propres activités. L’association a également prévu de développer des activités de service afin de ne pas dépendre uniquement des entreprises mécènes.

Des exemples, je pourrais en trouver d’autres. Mais le plus gros du chemin reste à faire. La mise en place de structures de taille significative est indispensable pour atteindre la masse critique qui provoque l’adoption généralisée. Ces structures doivent cependant se méfier des risques liés à cette approche que nous verrons dans la troisième et dernière partie de cet article.

Crédit image : Certains droits réservés par yckhong


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Article original écrit par Philippe Scoffoni le 02/03/2013. | Lien direct vers cet article

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