Rencontre avec le créateur de la licence IANG pour un libre équitable

licence interview IANG équitable Une licence introduisant une relation équitable entre les utilisateurs et créateurs. Voici l’objectif que s’était donné son créateur il y a de cela quelques années. Il nous retrace son chemin et celui de la licence IANG.

Je vous interpellais dans un récent article sur la question des pratiques et dérives que l’on peut parfois constater autour des logiciels libres. A l’origine de ces “dérives” des entreprises, mais aussi parfois des associations d’intérêts “particuliers” dont les liens avec le monde entrepreneurial sont parfois étranges.

En préparant l’article en question, j’avais découvert une licence que je ne connaissais pas. Une découverte que l’on peut clairement attribuer à la muse “sérendipité“. Il s’agissait de la licence IANG. Une licence qui n’est pas récente mais qui est restée confidentielle.

Je vous conseille de lire ces pages pour bien comprendre les principes de cette licence :

J’ai donc essayé de prendre contact avec son créateur pour en savoir un peu plus sur la genèse de celle-ci. Il a bien voulu répondre à mes questions. Il vous présente dans le texte qui suit son histoire et l’histoire de cette licence. Il s’agit de Patrick Godeau que je remercie d’avoir bien voulu répondre à mes questions.
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Patrick : C’est par mon métier d’informaticien que j’ai rencontré les logiciels libres. Pendant mes études au début des années 1990, le web commençait à émerger, l’esprit libertaire animait Internet, et le partage des connaissances qui allait de soi dans ce milieu universitaire trouvait ses potentialités décuplées par ce nouveau média. C’était aussi les débuts du MP3 et de la révolution qui allait s’ensuivre.

Pratiquant par ailleurs la musique et la photographie, je me suis naturellement interrogé sur le type de licence à utiliser lorsqu’il s’est agi de diffuser des œuvres au public. À cette époque du début des années 2000, de nouvelles licences voyaient le jour (Creative Commons, Licence Art Libre) et tentaient de porter dans le domaine culturel les libertés acquises dans le logiciel.

Pourtant, aucune de ces licences ne répondait vraiment à mes attentes. J’étais surtout gêné par la contradiction flagrante entre les principes de coopération et de partage s’appliquant à la création libre, et ceux de compétition et de convoitise caractérisant son économie dans le cadre du marché. Pour beaucoup d’utilisateurs, libre signifie surtout gratuit, et pour beaucoup d’éditeurs, c’est un moyen d’externaliser à peu de frais le travail de nombreux développeurs. Et si une informatique libre peut être économiquement viable grâce au service, il n’en va pas forcément de même pour les biens culturels.

Je me suis donc attelé à la rédaction d’une nouvelle licence avec pour objectif de résoudre cette contradiction. Mon idée était que l’économie de la création devait répondre aux mêmes principes de liberté, d’ouverture et de solidarité que la création elle-même. D’abord, le commerce doit rester libre, donc exit la clause non commerciale. Ensuite, puisque le code source est ouvert, les comptes doivent l’être aussi. Enfin, de même que le copyleft empêche toute appropriation de la création, on ne doit pas pouvoir s’en accaparer le profit commercial. L’économie de la création est alors basée sur le même principe de don que la création elle-même; c’est ce que j’ai appelé l’écopyleft. Par ailleurs, la notion de liberté impliquant à mon avis d’avoir une voix dans les projets auxquels on participe, j’ai doté la licence de droits démocratiques. La juriste Mélanie Clément-Fontaine m’a aidé à formuler tout ça dans un texte assez concis.

Ayant rédigé la licence avant tout pour mon propre usage, je me suis peu occupé de sa propagande. Il faut dire aussi que j’ai plutôt tendance à fuir la publicité. Pour ce que j’en sais, la licence a été perçue comme assez complexe à manier, et certains libristes orthodoxes n’ont pas manqué de souligner sa non-conformité avec les canons du dogme. Sinon je crois que la licence a été citée dans quelques thèses, mémoires et articles de journaux, et utilisée par quelques musiciens (environ 400 morceaux sur Dogmazic).

Pour l’avenir, j’espère trouver le temps de réactiver le label Créalter qui diffuse le seul et unique CD sous licence IANG (à ma connaissance). Sinon j’ai aussi quelques projets de logiciels que j’espère diffuser en écopyleft un de ces jours. Dans l’idéal il faudrait aussi que je fasse un peu de prosélytisme, et heureusement que votre demande me donne l’occasion de m’y mettre. Merci à vous de rappeler au monde l’existence de IANG et de porter la bonne parole aux foules incrédules licence interview IANG équitable .


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Article original écrit par Philippe Scoffoni le 29/09/2011. | Lien direct vers cet article

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