Pourquoi l’Hadopi?
Voici un second billet à propos de l’HADOPI, jour où la seconde lecture reprend à l’Assemblée Nationale.
Ce qui motive ce billet, ce sont certaines réponses dans des commentaires de news HADOPI, notamment la fameuse capitulation : « tant pis pour eux, qu’ils fassent passer leur loi pourrie, elle ne s’appliquera pas ».
Les artistes sont arnaqués par cette loi, c’est une chose. On pourrait dire effectivement « ce n’est pas mon problème, tant pis pour eux ».
Plusieurs problèmes cependant.
Tout d’abord le fait de prendre (encore) du retard pour la juste rémunération des artistes n’est pas bénéfique à la culture.
Plus grave, elle bafoue beaucoup de principes de droit et remet en cause la justice : hadopi.pdf.
Mais pourquoi ils s’obstinent à faire passer le texte alors qu’il a été montré que ça ne fonctionnerait pas?
Pourquoi ?
Les artistes sont bernés (comme pour la loi DADVSI), mais les maisons de disques aussi (même si elles ont quand même un intérêt partagé à préserver leur modèle actuel). Ce projet de loi n’est bien sûr pas fait pour défendre la culture, et même si l’Hadopi ne fonctionnera pas, certains articles et amendements pourront s’appliquer.
Tout d’abord, le but est de commencer à casser la neutralité du réseau (intérêts économiques privés énormes), par l’amendement 50 de l’article 2 : article PCInpact.
Le lobbying français (entre autre) au niveau européen veut d’ailleurs imposer la discrimination du net en Europe : le projet Hadopi ne servira qu’à obliger les FAI à mettre en place les mesures techniques rapidement.
L’article 5, quant à lui, prépare l’arrivée de la loi LSI (LOPPSI2) prochainement présentée par MAM, qui préconise la surveillance et le filtrage des contenus consultés par les internautes, avec les dérives possibles (combinées à la labellisation, et déjà proposées par la Ministre de la Culture, comme le filtrage par liste blanche des bornes wifi, qui a été abandonné devant le tollé général, mais qui ne manquera pas de revenir dans les années à venir).
L’article 6 oblige, pour se défendre lors des accusations à tort de l’Hadopi, d’installer un mouchard sur les ordinateurs des citoyens. Bien sûr, ça ne sécurise en rien l’accès internet (référence au « logiciel de sécurisation» ), mais ça permet de faciliter la mise en place de certaines mesures de la loi LSI.
Réponse à certains arguments
Alors quand je lis certains artistes disant « il faut protéger la création », je réponds : « oui, c’est pour ça qu’il faut refuser l’Hadopi ».
Quand je lis certains pirates disant « tout doit être gratuit, on s’en fout des artistes riches, ils n’ont pas besoin de sous » (dont je me demande parfois si ce ne sont pas des commentaires de personnes en faveur du projet de loi qui veulent décrédibiliser les opposants au texte), je réponds : « non, les artistes doivent être rémunérés ; c’est justement ce que ne permet pas l’Hadopi ».
Quand je lis certains opposants disant « qu’elle passe cette loi, elle ne s’appliquera pas », je réponds : « ne vous limitez pas au principe de la « riposte graduée» , ce n’est qu’une façade (certes très contestable) ! La neutralité du réseau est en danger, et le filtrage des contenus permettra un contrôle accru de l’information « officielle» ».
Le texte
Vous pouvez consulter le texte du projet de loi :
- la seconde lecture (qui commence ce soir) ;
- la première lecture (notamment pour avoir le contenu des éléments cités « conformes» dans la nouvelle version).
Assistez aux débats à l’Assemblée Nationale
Si vous pouvez, venez assister aux débats à l’Assemblée Nationale, en général c’est rendez-vous 21h15 devant l’entrée les soirs de débats HADOPI. C’est toujours intéressant de voir comment ça se passe « en vrai» (et on peut voir de nos propres yeux les députés godillots, ce qu’on ne voit pas toujours dans la diffusion en streaming).
L’agenda est disponible ici.
Pensez à prendre votre pièce d’identité pour assister aux débats depuis les tribunes.
Un article intéressant est paru le 20 mai sur Numerama : Décryptage : Sarkozy et son oeuvre de contrôle du net.
Le contrôle du net