Le Planet Libre a t-il renoncé à convaincre ?
Mais pourquoi le Planet Libre devrait-il convaincre au fait ?
D'abord, parce que, lorsque l'on embrasse le Logiciel Libre, on ne se contente pas de l'utiliser : on rejoint une communauté, on rallie une cause, on participe à un mouvement. Ce qui ne va pas sans une certaine forme de prosélytisme, il faut bien le reconnaître.
Ensuite, parce que ce sont les responsables du projet qui le disent :
Goals
- Educate : inform the public about free software
- Advocate : promote free software tools through projects, campaigns, and events
- [...]
ce qui peut se traduire par :
Objectifs
- Informer : faire connaître les logiciels libres au public
- Encourager : promouvoir les logiciels libres à travers les projets, campagnes et événements
Décision du Planet Libre d'abandonner ses comptes identi.ca et Twitter
Dans un billet rédigé au nom du Planet Libre par theClimber, un garçon tout à la fois charmant, dévoué et compétent par ailleurs, on apprend que l'équipe du Planet Libre a décidé, dans ce qui s'apparente à une décision purement dogmatique, de ne plus utiliser de comptes identi.ca ou Twitter pour relayer les informations du Planet.
Entendons-nous bien : je ne fais pas l'apologie de Twitter que je ne recommande pas. Passer de cette invention miraculeuse qu'est l'Internet ouvert (le Web, le courriel...) et acentré à des services extrêmement centralisés et fermés est évidemment un beau gâchis que l'on ne saurait cautionner.
Il faut aussi féliciter l'équipe du Planet Libre qui met en place, dans le plus pur esprit de l'Internet originel, son instance de StatusNet, c'est un dire un système de microblogage basé sur des formats ouverts utilisables par chacun et permettant de garder le contrôle de ses données plutôt que de s'en remettre à un tiers à cet effet.
Cependant il aurait été tout à fait possible de publier d'abord sur cette plateforme de microblogage personnalisée puis de relayer les informations sur identi.ca et Twitter afin de toucher le maximum de personnes, ce qui est, nous l'avons vu, le but du Planet !
Au lieu de cela, faisant preuve d'un bel aveuglement, l'équipe du Planet Libre a décidé majoritairement de se couper à l'avenir d'une bonne partie du monde connecté (dont l'essentiel des utilisateurs à convaincre), sans parler des 611 abonnés actuels lâchés dans la nature comme le fait remarquer Cyrille dans son récent billet.
Le retour de la quadrature du Libre
J'avais déjà publié un billet sur le sujet, que j'avais intitulé La quadrature du Libre (oui, je suis très fier du titre :-).
La question qui se pose tôt ou tard au libriste est : faut-il utiliser les technologies non-libres pour promouvoir le Libre ? Car, pour pouvoir communiquer avec la personne à évangéliser, il va falloir recourir, dans une certaine mesure, au mêmes technologies non-libres que son interlocuteur, celles-là même que l'on entend dénoncer !
C'est pourtant un mal nécessaire : autrement, en ne prêchant que des convaincus, on renonce à convaincre.
Ma position actuelle sur le sujet pourrait se résumer ainsi :
- Utiliser des services propriétaires (Twitter ou, pire : Facebook) pour convaincre : favorable (c'est ce que nous venons de voir. Quel meilleur moyen pour dénoncer Facebook que de le faire de l'intérieur ? Ainsi on est sûr de toucher le public visé. Personnellement je n'utilise ni ces services ni leur homologue libre, mais vous trouverez en bas de cet article les habituels boutons de partage via les réseaux sociaux pour ceux qui y ont recours),
- Utiliser des services propriétaires (par exemple Facebook, le mal absolu) pour y mettre mes données personnelles : défavorable (tant dans mon propre intérêt que pour l'exemple donné),
- Utiliser des services extérieurs (Google Analytics, publicité ciblée, bouton « J'aime » de Facebook – encore lui – et autres techniques d'espionnage, avec la complicité consciente ou non du Webmestre) sur un site (ou pire : sur un site parlant du Libre !) : défavorable (ça me paraît évident, quoique cela le soit beaucoup moins si l'on regarde les sites relayés par le Planet Libre, dont à mon grand regret le Framablog qui fait usage de Google Analytics).
L'essentiel étant que l'usage de technologies fermées – ici considérées comme un mal nécessaire, je n'y reviens pas – ne soit pas exclusif, et que la totalité de l'information reste accessible à titre principal au moyen de technologies ouvertes.
Pour conclure, je pense qu'il ne faut pas hésiter à « aller chercher le client » y compris en s'aventurant sur des territoires non libres. Ceci étant dit, dans tous les cas il y a une question (certes difficile) de mesure. Voire d'exemplarité pour certains (Stallman...) comme le faisait remarquer à juste titre Lolo le 13 sous le billet La quadrature du Libre.