L’industrie du logiciel open source devrait-elle ressembler à celle du logiciel propriétaire ?

L’idée originale de cette question remonte à un billet publié en 2008 par DaveNeary et qui est remis en lumière par un article du site 451 CAOS Theory intitulé : Pourquoi n’y a-t-il pas de sociétés open source de plus d’un milliard de dollars  de chiffre d’affaires ? Par société open source, comprenez « pur » éditeur de logiciel open source. Google est hors catégorie bien qu’ayant bâti son succès sur les logiciels open source, il n’est pas à proprement parlé un « simple » éditeur, mais un utilisateur et un contributeur massif.

Un des exemples cités est celui de Red Hat qui a bouclé un exercice 2009 de 750 millions de dollars de chiffre d’affaires en progression de 15%. Pourquoi ce chiffre d’affaire reste-t-il si faible au regard du marché des systèmes d’exploitation d’entreprise et pourquoi croit-il si lentement ?

Parmi les raisons avancées par son CEO Jim Whitehurst vient celle selon laquelle les produits de Red Hat  permettent aux entreprises utilisatrices de réaliser des économies. Ces économies représenteraient une forme de manque à gagner pour Red Hat. Une façon de reconnaître à demi-mot que les éditeurs propriétaires se sont « engraissés » sur le dos de leurs clients durant toutes ces années.

Pour les opposants à l’open source, au contraire ce faible chiffre d’affaire tend à prouver l’échec du modèle. On peut leur opposer que cette « disparition » apparente de valeurs résulte en fait de son déplacement vers les utilisateurs. Elle n’est pas sortie du système, mais se retrouve dans les nouvelles possibilités ainsi offertes à ces derniers.

Je doute qu’Amazon ou Google aient pu construire leurs usines numériques s’ils avaient dû les bâtir sur des produits propriétaires et payer autant de licences que de machines. Des accords commerciaux auraient pu être trouvés, mais auraient-ils suffit ? Amazon  ou Google auraient-ils pu adapter avec autant de facilités le logiciel à leurs besoins ?

Il serait donc bien plus difficile à un éditeur open source de faire grossir ses revenus que pour un éditeur propriétaire. Il n’est pas ici question de compétences, de qualité de logiciel ou que l’open source soit en train d’échouer. Comparer ces deux industries revient à comparer deux choses au final différentes. Les métriques ne peuvent correspondre.

Même si la cible des un milliard est inatteignable, cela veut-il dire que ces entreprises ne sont pas viables ? A mon avis non. Beaucoup de « petits » éditeurs open source existent et prouvent tous les jours le contraire. Mais ces entreprises sont peut-être bâties sur d’autres valeurs et donc motivées par d’autres objectifs. On ne peut pas adhérer à l’idée de partager ce que l’on fait sans avoir une certaine vision de notre société.

En faisant « cadeau » de la marge traditionnellement ponctionnée par les éditeurs propriétaires, ces entreprises contribuent au développement de celles qui utilisent leurs produits et donc à l’amélioration de notre économie au final. Une vision idyllique certes et il faut garder à l’esprit que le modèle open source est parfois utilisé comme une simple arme marketing pour casser des marchés existants. Les opportunistes existeront toujours.

Alors cela veut-il dire que l’open source sera synonyme de petites entreprises, mais plus nombreuses ? Une forme de vision plus numérique, plus distribuée de notre société par opposition au modèle pyramidale que nous connaissons et souvent caractéristique des géants du logiciel propriétaire ?

Paternité


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Article original écrit par Philippe Scoffoni le 14/06/2010. | Lien direct vers cet article

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