Logiciel libre au Québec : Victoire de David contre Goliath

Le 13 mars 2008, Savoir Faire Linux, société de services québécoise dépose une requête devant un tribunal québécois, afin de faire déclarer que la Régie des Rentes du Québec[1] a agi illégalement en ne procédant pas à un appel d'offres, lié au renouvellement d'un parc de logiciels, comprenant systèmes d'exploitation et logiciels bureautiques destinés à ses employés. Savoir Faire Linux reproche tout simplement à cette régie d'avoir fait un choix a priori, notamment sans faire intervenir le marché et le potentiel du logiciel libre dans ces domaines.

La Cour Supérieure de la Province du Québec vient de donner raison à Savoir Faire Linux, en confirmant l'illégalité de la procédure utilisée par la Régie des Rentes du Québec ainsi que l'obligation pour cette structure gouvernementale de procéder à un appel d'offres pour ce type de marché. Cette décision n'a pas d'impact sur la décision de la Régie et n'annule pas le marché passé avec Microsoft et son fournisseur. En revanche, elle confirme que les petits[2] peuvent obtenir des victoires contre les géants[3].

Par ailleurs, dans son jugement, le tribunal énonce un certain nombre de faits pouvant amener d'autres autorités québécoises à se poser des questions lors de leurs appels d'offres. Notamment, le jugement est fondé sur un principe simple de la réglementation québécoise en la matière : Le principe sur ce type de marché est l'appel d'offres qui proposent toutes les garanties de transparence au citoyen dans l'utilisation de l'argent public[4]. Par exception, les structures gouvernementales québécoises peuvent utiliser une autre procédure, sous plusieurs conditions, l'une d'entre elles et non la moindre étant l'obligation d'une recherche sérieuse et documentée. Or dans cette affaire, la Régie a été incapable de démontrer par une quelconque étude que seule Microsoft pouvait répondre à son besoin. Qui plus est, le tribunal relève que "l'examen de la documentation démontre que chacune des solutions logiciels libres et propriétaires comporte des avantages, désavantages et incompatibilités à surmonter". Cet argument balaie de fait le confort supposé qu'il y a à passer d'années en années à ces versions supérieures de logiciels d'un même éditeur, en l'occurence Microsoft[5]. Au contraire, le tribunal relève qu'il s'agit d'une migration et non d'une mise à niveau, tant les produits cible sont éloignés de ceux qu'il sont censés remplacer.

Cette décision fera, on l'espère pour eux, jurisprudence chez nos cousins d'outre-atlantique. Un grand bravo à David !

NB : Ironie de l'histoire, Savoir Faire Linux est aussi Partenaire certifié Microsoft.

Toute l'histoire est relatée depuis mars 2008 sur le blog de Cyrille Béraud, fondateur de Savoir Faire Linux. Vous pourrez notamment y trouver une copie du jugement (PDF).

Notes

[1] Organisme gouvernemental québécois administrant les rentes, les régimes complémentaires de retraite et le un programme de crédit d'impôt

[2] Savoir Faire Linux est une entreprise de 25 personnes

[3] Au tribunal, outre la Régie elle-même, Microsoft et son fournisseur étaient représentés contre Savoir Faire Linux

[4] Ce qui est la moindre des choses

[5] L'objet du projet était de faire passer des postes de travail vers Windows Vista et Office 2007

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