Licence de brevets exhaustive de Google pour VP8 contre vague promesse de Microsoft pour Mono : cherchez l'erreur

Métaphore de l'affrontement du bien contre le mal

WebM (Web Media) est le nouveau format libre et ouvert de vidéo pour le Web promu par Google, Mozilla, Opera et d'autres.

Il se base sur le codec vidéo VP8 développé par la société On2 qui a été récemment achetée par Google.

Répondant aux espoirs fous de ceux qui se soucient de préserver le Web ouvert (au sein duquel la vidéo occupe une large part aujourd'hui), Google a décidé de faire don de cette technologie à la communauté des utilisateurs et développeurs.

Chose toute aussi importante, WebM sera utilisé par YouTube pour toutes ses vidéos (via la balise video de HTML5) : de quoi faire pencher la balance du côté de ce format libre et ouvert plutôt que du côté du H264, son concurrent soumis à lourdes redevances et soutenu jusque là par Microsoft et Apple qui espéraient avec lui étouffer l'innovation, éradiquer la concurrence et ainsi faire main-basse sur le Web.

Chapeau bas, Monsieur Google.

Puisque le diable se cache souvent dans les détails, je me suis penché sur la licence concédée par Google pour l'usage de cette technologie...

Ne laissons pas durer le suspens plus longtemps : la licence conçue par Google traduit loyalement en termes juridiques la promesse qui vient d'être faite.

Concrètement Google a publié la spécification de VP8 et a libéré l'implémentation existante (libvpx) en plaçant cette dernière sous licence BSD. En outre la firme de Mountain View accorde, pour l'usage de la spécification (ici) comme de son implémentation (), une licence d'exploitation des brevets qu'elle détient (ou pourra détenir) pour tout usage – commercial ou non – qui sera fait de cette implémentation ou de toute autre mise en œuvre de la spécification. Cette licence est concédée à titre perpétuel, mondial, gratuit et irrévocable (sauf pour ceux qui tenteraient de revendiquer des brevets contre une implémentation de la spécification, ce qui renforce habilement la protection du dispositif) :

VP8 Bitstream Specification License
Google hereby grants to You a perpetual, worldwide, non-exclusive, no-charge, royalty-free, irrevocable (except as stated in this section) patent license to make, have made, use, offer to sell, sell, import, and otherwise transfer implementations of this specification where such license applies only to those patent claims, both currently owned by Google and acquired in the future, licensable by Google that are necessarily infringed by implementation of this specification. If You or your agent or exclusive licensee institute or order or agree to the institution of patent litigation against any entity (including a cross-claim or counterclaim in a lawsuit) alleging that any implementation of this specification constitutes direct or contributory patent infringement, or inducement of patent infringement, then any rights granted to You under the License for this specification shall terminate as of the date such litigation is filed.

Soit exactement ce que la Free Software Foundation demande de la part de Microsoft pour l'utilisation de Mono (au lieu de la vague promesse actuelle).

Je savais que Google attirait les meilleurs développeurs de la Silicon Valley comme un aimant, au détriment d'autres entreprises jugées aujourd'hui moins « sexy » comme Microsoft, mais j'ignorais que Microsoft devait également faire face à une pénurie de juristes, seule explication sensée à la piteuse qualité juridique de la Community Promise pondue par Microsoft et qui est supposée garantir les utilisateurs de Mono (en fait un véritable torche-cul qui ferait honte à un étudiant en droit de première année). Je suggère vivement à Microsoft de renvoyer ses juristes à l'école et d'utiliser à l'avenir le contrat de licence de brevets conçu par Google s'il veut vraiment garantir les utilisateurs de ses technologies maison et ainsi favoriser leur diffusion.

À moins que Microsoft ne se ménage délibérément des armes contre la communauté sous couvert de pseudo-garanties, afin d'inciter dans un premier temps à utiliser ses technologies brevetées pour mieux porter l'estocade ensuite ? Mais là ça serait carrément vicieux, n'est-ce pas ?

Rappelons pour terminer que les brevets logiciels ont un effet anti-concurrentiel qui nuisent au final à l'innovation dans les pays qui reconnaissent ce système (États-Unis d'Amérique, Japon, Corée du Sud... Pour l'instant l'Europe résiste !) : recours abusifs, racket, renforcement des monopoles et oligopoles en créant artificiellement des obstacles financiers à l'émergence de concurrents innovants... Il est donc essentiel, si l'on veut défendre un modèle de concurrence par l'innovation plutôt que par la taille du portefeuille, de se battre contre le système des brevets logiciels et, dans tous les cas, de privilégier les formats libres de brevets.

Lire aussi les épisodes précédents de la bataille de la vidéo sur le Web :

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