Peut-on vendre des applications open source sans que ce soit du vol ?
Les passionnés de logiciels libres ont parfois des réactions épidermiques à la vision prix affiché à côté de noms de logiciels libres. C’est ce qui est arrivé à Pierre-Yves aujourd’hui en tombant sur ce site. C’est vrai que si l’on y regarde un peu vite on se dit qu’ils sont sacrément gonflés de vendre des logiciels libres en « boite ».
En fait, ce site vend de l’hébergement d’applications avec des services associés et se base sur un catalogue de logiciels libres répondant à divers besoins. De quoi calmer l’inquiétude de Pierre-Yves, Desklance ne semble vendre que du service.
Cependant et si Desklance avait seulement vendu des boites avec un CD sur lequel était gravé un logiciel libre, cela aurait-il été du vol pour autant ?
Pour en avoir le coeur net tournons-nous vers la référence en la matière : le site de la Free Software Foundation. Voici un extrait de la FAQ :
- Does the GPL allow me to sell copies of the program for money?
- Yes, the GPL allows everyone to do this. The right to sell copies is part of the definition of free software. Except in one special situation, there is no limit on what price you can charge. (The one exception is the required written offer to provide source code that must accompany binary-only release.)
- Does the GPL allow me to charge a fee for downloading the program from my site?
- Yes. You can charge any fee you wish for distributing a copy of the program. If you distribute binaries by download, you must provide “equivalent access” to download the source—therefore, the fee to download source may not be greater than the fee to download the binary.
- Does the GPL allow me to require that anyone who receives the software must pay me a fee and/or notify me?
- No. In fact, a requirement like that would make the program non-free. If people have to pay when they get a copy of a program, or if they have to notify anyone in particular, then the program is not free. See the definition of free software.The GPL is a free software license, and therefore it permits people to use and even redistribute the software without being required to pay anyone a fee for doing so.
- If I distribute GPL’d software for a fee, am I required to also make it available to the public without a charge?
- No. However, if someone pays your fee and gets a copy, the GPL gives them the freedom to release it to the public, with or without a fee. For example, someone could pay your fee, and then put her copy on a web site for the general public.
En français :
- Il est possible de vendre un programme sous licence GPL,
- Il est possible de faire payer le téléchargement d’un logiciel libre,
- Il n’est pas possible d’imposer que quiconque reçoit un logiciel libre soit obligé de payer une somme quelconque à son auteur,
- Il n’est pas obligatoire de rendre disponible un logiciel libre au public si je le distribue contre paiement. Par contre, la première personne qui se sera acquittée du paiement pour obtenir le logiciel sera ensuite libre de le rendre public sur un site web. Conformément au point précédent je ne pourrais pas réclamer de paiement pour les téléchargements effectués sur ce site.
Le dernier point montre clairement qu’une approche « boutique » qui commercialiserait des logiciels libres en « boite » aurait peu de chance d’atteindre un jour une certaine rentabilité. Cependant, tout le monde ne dispose pas d’une liaison haut débit sur la planète et dans certains pays obtenir un CD ou un DVD contenant un logiciel libre peut avoir un prix. Je vous livre un autre exemple de services construit autour de logiciels open source : JumpBox qui vous propose des logiciels « clef en main et prêt à l’usage ».
Il me semble clair que dans l’esprit de la FSF, il n’a jamais été question d’empêcher quiconque de gagner de l’argent avec les logiciels libres, ni d’imposer la gratuité.
[Début ajout : 30/09/2009]
Mais je parle ici des licences libre. Qu’en est-il des licences open source ? Si l’open source et le libre diffèrent sur le plan idéologique et politique, il n’en va pas tout à fait de même pour les licences. Pour l’open source, c’est l’OSI (Open Source Initiative) qui décide si une licence est open source ou pas. Premièr constat, les licences libres de la FSF sont également open source. J’avais tenté d’établir dans un tableau récapitulatif, les licences open source qui n’étaient pas libres. Un travail pas simple, mais qui avait mis en évidence que globalement les licences open source étaient libres mais parfois incompatible avec la GPL. On le voit le distinguo Libre/open source n’a quasiment pas de conséquence dans l’évaluation des licences.
[Fin ajout : 30/09/2009]
Dans les faits il est cependant très rare de devoir payer pour télécharger un logiciel libre. Cet état a fait que la valeur s’est déplacée vers les services et les données. Il y a même certains pans de l’économie numérique ou l’absence de coûts des licences libres a permis de rendre également gratuit un grand nombre de services en ligne. Si bien qu’il ne reste plus que la donnée (nos données) pour créer de la valeur.
C’est un peu la « magie » du numérique qui rend les choses que l’on crée « sans valeur » au sens monétaire. Les créations numériques sont dupliquables à l’infini contrairement aux créations physiques. Paradoxalement, celui qui a la capacité de les créer possède alors un capital qu’il peut chercher à valoriser autrement. Comment ? C’est toute la difficulté à laquelle sont confrontés bien souvent les développeurs obscurs de logiciels que nous utilisons pourtant quotidiennement.
Une conclusion elle-même un peu obscure, mais je n’ai pas fini de digérer le dernier livre de Chris Anderson : « Free »dont vous trouverez ici une synthèse. Il me reste quelques chapitres encore à lire et nous pourrons en reparler.
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