Holy Motors : pour Oscar, ca tourne !

Holy Motors : Oscar de la Jeunesse ?

M. Oscar{.left} Présenté en compétition officielle du festival de Cannes 2012, Holy Motors est primé par un Oscar de la Jeunesse. Et là, je me dis que la jeunesse n’est pas une génération totalement perdue tant le film peut s’interpréter de manières diverses, voire rebuter si l’on ne prend pas le temps. Oscar est le nom de cet être étrange que nous suivons, alors qui’il vogue de vie en vie. Dix vies. Dix actes. Dix leçons. La première scène nous montre un public endormi au cinéma : allons-nous aussi nous endormir devant cet ovni ?

Une ode au cinéma et au théatre ou sujet d’anthropologie ?

Oscar est donc cet homme dont on ne voit jamais le vrai visage qui va prendre la vie d’un autre pendant quelques minutes ou heures. Tour à tour vieux banquier, vieille mendiante russe, monstre dans un cimetière, père de famille… Chaque scène, chaque rendez-vous, est orchestré à la seconde et nous propose un film à part entière. Sans lien, chaque scène est un acte de la pièce jouée par Oscar (Denis Lavant) et accompagné par Céline (Edith Scob) qui lui sert de chauffeur de limousine et d’assistante. La journée est chargée. Dix actes nous attendent. On pourra passer de la vie peu passionnante du banquier aux trubliations d’un monstre du cimetière se la jouant Fantome de l’Opera et kidnappant une mannequin, campée par Eva Mendes. Et là, l’un des points clés du film : la relation d’Oscar avec les femmes. Toutes veulent le manipuler à leur façon : l’assistance et la planification pour Céline, le calme et l’acceptation pour le mannequin, le mensonge par la petite fille, les souvenirs pour sa collègue … Toutes prendront l’ascendant sur lui, le menant où elles désirent ou le faisant réfléchir à sa situation, à sa vie (absente). Puis, comme au théatre, nous avons le droit à notre entracte. Ou simplement, le 6e rendez-vous d’Oscar. Un boeuf d’accordéons dans une église. Rafraîchissant et bien placé. A noter la présence de Bertrand Cantat pour manier l’harmonica. ”3 ! 12 ! Merde !”

Puis c’est la descente aux enfers pour Oscar dont la fatigue de la journée se fait sentir. Le stress se ressent. On est essoufflé pour lui. Perdu dans ses dossiers comme lui. A ne plus savoir qui il a été, qui il est et qui il va être. La rencontre de la Fée Verte, Kylie Minogue, apparaît comme une divine venue. Chantante (“Who were we”), elle rappelle à Oscar son passé, leur passé. Ces êtres sans visages, sans vie propre, ces mannequins, nous font visiter les ruines de  la Samaritaine, le sol jonché de mannequins démembrés, en compagnie de ses êtres sans visage est oppressant. Mais le passé doit rester le passé. Le présent se charge de le lui rappeler de manière violente. Céline dépose alors Oscar à son dernier rendez-vous avant de ramener la limousine au hangar d’Holy Motors. Alors qu’on ne voit jamais le vrai visage d’Oscar, Céline masque enfin le sien en nous quittant. S’engage alors un épilogue entre les âmes de ces vaissaux guidant les gens vers leurs derniers voyages, comme s’amuse à le dire Leos Carax. Ce film est déroutant : ce qui est réel semble irréel et inversement. Les standards sont bousculés. On ne comprend jamais vraiment le but à tout ceci. On se plait à repenser à Code Quantum dans lequel Sam voyageait de vie en vie afin d’aider les autres, accompagné d’Al. Les choses sont ici bien plus rapides, brutales. Al est devenu une femme et Ziggy une limo. Une manière de marqué l’impulsivité et le mouvement, alors que la série prenait son temps.  Mais alors que tout va mal pour lui et que sa vie ne lui plait pas, pourquoi continuer ? Et nous, pourquoi continuer à regarder ce film qui semble décousu ? Comme le dit Oscar, on continue pour le spectacle. Et c’est pour cela qu’on va voir ce film. Profiter de l’esthétisme. Inspirer la méditation. Apprécier la vie. Arriver à sa conclusion, le cerveau bouillonne. La digestion est longue mais bénéfique. A voir sans conteste.

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Publié par Francois Aichelbaum : 171