Fabriquer et partager
Résumé : faire en sorte que le monde matériel soit aussi agréable que le monde du logiciel libre
Logiciel Libre
Depuis près de 10 ans, ma culture est fortement influencée par le Logiciel Libre. Il s'en est suivi l'auto-hébergement. L'apport est immense :
- Indépendance. Liberté d'usage, c'est la liberté 0.
- Connaissance. Compréhension profonde du fonctionnement des logiciels. Elle n'est pas totale car un OS est devenu un système complexe mais j'ai le sentiment d'avoir une vision globale du système et locale lorsque je désire comprendre le fonctionnement précis d'un algorithme.
- Sureté. Elle découle du point précédent. Rien n'est 100% sûr, mais le modèle du libre m'assure une sureté maximale en terme de vie privée et de fiabilité.
- Evolutivité. Je peux modifier un morceau pour l'adapter à mes usages. Je peux écrire des codes pour automatiser des tâches. Avant d'être un outil de communication, ce fût le premier intérêt de l'informatique, avant que l'usage majoritaire comme une télévision ne s'impose.
- Pérennité. Je réduis au maximum ma dépendance au bon vouloir d'un éditeur privé qui pourrait m'imposer des limitations (DRM), cesser le développement, perdre en rétrocompatibilité.
- Résilience. Eviter les silos, les solutions uniques. Le logiciel Libre, avec sa part communautaire, renforce la coopération, l'acentralisation et la résilience.
- Prix. Faible coût de l'ensemble. Il pourrait être nul, mais j'apporte ma petite contribution financière lorsque temps et/ou connaissances me manquent.
Mais tout ceci concerne les biens non-rivaux. Qu'en est-il des biens rivaux (ie matériels) ?
Le monde matériel
Je suis de plus en plus déçu par les solutions toutes faites, que ce soit dans le cadre personnel comme professionnel. Il y a deux stades.
Stade 1 : quand ça marche
Quand ca fonctionne :
- les solutions existantes ne sont pas toujours adaptées aux besoins. C'est se résigner à avoir une épine dans le pied en permanence.
- les solutions existantes possèdent des fonctionnalités dont je n'ai que faire. Le produit est donc plus complexe que nécessaire, donc plus sujet à la panne et éventuellement au manque de facilité d'usage.
- la solution acquise ne peut pas évoluer, il faut racheter.
- les prix sont exorbitants (surtout pour les marchés de niches, ici je pense au cadre professionnel). Un facteur 10 entre le coût des composants et le produit n'est pas impossible, loin de là.
- le fabricant a pu mettre en place de l'obsolescence programmée.
Stade 2 : ça ne marche plus
L'appareil tombe en panne :
- le fabricant ne gère plus le produit, le fabricant n'existe plus (manque de pérennité).
- le coût de la réparation est délirant. Pour des problèmes mineurs, j'ai déjà vu des fabricants changer toutes l'électronique d'un appareil. Cherche-t-on à pousser au nouvel achat ?
- difficulté d'interfacage d'un produit : pas de standard de communication prévu, ou protocoles fermés/non interopérables/obsolètes.
Approche de solutions
Cette approche veut se calquer sur celle que m'apporte le logiciel Libre au sens où on y retrouve les mêmes avantages : indépendance, connaissance, évolutivité, pérennité, prix. Le point sureté est cependant moins évident.
L'approche que je me propose est donc de cuisiner plutôt que d'acheter le plat préparé. Ca demande d'apprendre la cuisine, de passer un peu de temps, mais la première satisfaction est la satisfaction personnelle et intellectuel d'avoir réussi et appris. Attention, il n'est pas question de partir de zéro mettant en place une rizière dans le jardin.
Il s'agit donc d'apporter une réflexion critique sur les produits que l'on nous vend. Il y a deux niveaux de réflexion à distinguer :
Niveau 1. Parmi un ensemble de solutions clés en main, laquelle m'offrira le moins de désavantages compte tenu des stades 1 et 2 ci-dessus :
- Balance besoin réel - offre
- Bidouillabilité
- Relation de dépendance au fabricant
Niveau 2. Balance prix fait-main plus temps / tout-fait moins apprentissage.
En cherchant une échelle plus atomique de l'achat, c'est généralement maximiser un niveau de satisfaction du niveau 1. C'est adopter l'esprit "hacker" au sens noble du terme. C'est se donner une puissance sur les choses en agissant plutôt qu'en étant passif et donc tributaire des aléas. La valeur de l'échelle est donnée par le niveau 2.
Exemple d'une station météo :
- échelle 1 : achat d'une station toute faite
- échelle 2 : achat d'un capteur d'humidité, de température, d'un microcontrolleur, et d'un afficheur
- échelle 3 : se fabriquer un capeur d'humidité, se fabriquer un afficheur...
L'échelle 2 maximise mon niveau 1 et 2.
Quelques points de départ pour réfléchir
J'apprécie beaucoup la vision de David Manise, et en voici une tranche, que je renommerai bien en "Les 10 trucs les plus importants pour vivre...", s'il me le permet. Je n'aime pas ce terme survie (et lui non plus, d'après ce que je sais).
Les points 8 à 10 nous intéressent ici :
- Ton matériel doit être simple et fiable. Plus ça ressemble à une massue, mieux c’est. Plus ça ressemble à une calculette, moins ça marchera. Une lame fixe ressemble plus à une massue qu’un couteau suisse. Un poncho est plus « massue » qu’une veste. Etc. Moins de pièces mobiles, plus de qualité de finition/fabrication.
- Toujours tricher, toujours gagner. Sors du cadre. Ne t’impose pas de contraintes artificielles. Si c’est une mauvaise idée qui fonctionne, c’est que c’est une bonne idée. Ne laisse personne t’enfermer dans une prison mentale. Reste libre, critique, et humble.
- On a toujours avantage à coopérer. Même égoïstement, c’est généralement plus payant de coopérer avec les gens qu’on rencontre. Ne fais pas confiance aveuglément. Ne sois pas non plus paranoïaque. Assainis en permanence ton réseau. Tisse du lien avec des gens bien. Evite et oublie les autres. Tout simplement.
Plus particulièrement, pour le point 8, je cite David Manise sur l'apport d'une massue par rapport à un couteau suisse :
Si les massues de nos ancêtres sont restées à la mode pendant des millions d’années (pour finalement être célébrées dans le cadre d’un étrange culte semi-religieux que les États-Uniens appellent « base-ball »), ça n’est pas pour rien. La massue est l’archétype de l’outil de survie idéal : simple, fiable, d’une efficacité brutale, et ne sollicitant ni notre intelligence, ni notre motricité fine. Lorsque vous avez un choix à faire entre deux pièces d’équipement, choisissez donc, de façon réaliste, celle qui a le plus de points communs avec une bonne vieille massue... Le plus simple, le plus efficace, le plus facile à utiliser (pour vous), le plus robuste. Les pièces d’équipement de type « massue », loin d’être un choix démontrant un manque d’intelligence, sont une approche réaliste. Elles sont par ailleurs d’autant plus intéressantes qu’elles nous permettent un éventail beaucoup plus large d’utilisations « originales », qui diffèrent parfois grandement de leurs applications d’origine. À titre d’exemple, je dirais qu’on peut très bien utiliser un bandana pour égoutter des pâtes, mais qu’une passoire fait une bretelle de sac à dos plutôt médiocre. De même, un simple bâton de marche peut servir de bras de levier, de grattoir, de point d’appui pour un abri, de béquille, de perche pour faire tomber les pommes ou pour écarter les ronces (et accéder à cette belle grosse mûre bien juteuse sans se piquer), voire de bois de chauffage (vécu !).
Ca peut parraitre elliptique, ce paragraphe est là juste pour essemer.
Ouverture de mes notes
La conséquence est l'ouverture de mes notes. Je possède des wiki privés et je vais en ouvrir une partie du contenu.
Les objectifs sont les suivants :
- établir une revue bibliographique
- documenter ce que je fais et les choix qui sont pris
- déposer les explications et les codes sous license libre afin qu'ils puissent être repris et améliorés
Le site est ici : http://share.sciunto.org et j'ai choisi l'anglais afin de partager avec le plus grand nombre. Il m'arrivera, comme d'habitude, de déposer une petite note sur ce blog ; l'un n'exclue pas l'autre.