Zimbra, OBM et Blue Mind sont sur un bateau, tout le monde tombe à l’eau ?
Je dois avouer que j’ai été surpris ce matin en lisant mes flux RSS et en découvrant un article intitulé « Linagora se gausse de Zimbra, et vante OBM… Et si l’on parlait de Blue Mind ? ». Difficile de rester indifférent et à cela plusieurs raisons.
Tout d’abord la forme de l’article. Le rédacteur s’en prend directement à Alexandre Zapolsky, le dirigeant de Linagora et à sa campagne de communication clairement « anti-Zimbra ». Une campagne commencée lors du choix par le GIP Renater de la suite Zimbra.
L’auteur nous fait ensuite la petite histoire du projet OBM, une messagerie collaborative. Cette dernière fut acquise lors du rachat en 2006 de la société toulousaine AliaSource. En 2010, tout ou partie de l’équipe en charge du développement d’OBM (celle d’AliaSource apparemment) quitte Linagora pour fonder une autre société nommée Blue Mind et pour développer une nouvelle messagerie collaborative concurrente.
J’aurais tendance à dire, c’est du business, des affaires de relations humaines, ça ne regarde que les personnes concernées. Le journaliste se sert de cette petite histoire pour casser un peu de sucre sur le dos de A. Zapolsky.
En soi l’article n’a pas d’intérêt et passe à côté des questions de fond. J’aurais même tendance à dire qu’il est contre-productif et fait au final de l’ombre à tout le monde, y compris à ceux qui n’avaient probablement rien demandé, logiciel libre compris.
Nous avons ici l’illustration de ces petites histoires de rachat qui tournent autour des logiciels libres portés par UNE entreprise. Regardons Zimbra, un bon outil au demeurant, qui change de main régulièrement et dont on se demande à chaque fois quelle partie de son code va se fermer un peu plus. Quant à l’histoire d’OBM et de Blue Mind, elle montre une autre fragilité, celle du lien étroit de subordination entre les développeurs salariés et l’employeur. La moindre discorde et tout peut partir de travers. Au final, c’est beaucoup d’argent et d’énergie gâchés.
Le modèle communautaire s’il n’est pas parfait permet en partie d’amortir cet aspect et de donner une plus grande pérennité aux projets. Bien sûr, rien n’empêche les disputes et les forks entre équipes de développeurs. Mais, les rapports de force ne sont pas de subordination contractuelle, client/fournisseur ou salarié/dirigeant. La gouvernance et la diversité des acteurs permettent d’établir un équilibre sur le long terme. Mais les communautés de développeurs ne sont probablement pas toujours faites pour réaliser des logiciels “ready to use”.
Alors bien sûr, heureusement qu’il y a des éditeurs de logiciels libres ou open source. Sans eux, nous n’aurions pas autant de solutions matures à mettre à disposition des utilisateurs. Je parle ici du domaine des entreprises, la question est différente dans le monde du grand public. Dans le domaine de la messagerie collaborative, c’est même devenu « criant ».
Il nous reste encore les communautés d’usages et d’utilisateurs qui en mutualisant leurs moyens pourraient réaliser cette “symbiose parfaite”. Pourquoi pas une MessagingFundation, portant une suite logicielle dédiée à la gestion des “messages” sur l’internet tout comme Mozilla se veut le garant d’un web “ouvert” et respectueux des standards. Certains essaient de monter ce genre de communautés depuis longtemps.
Mais faire du logiciel libre en l’état, n’est-ce pas comme décider d’abandonner sont travail à « l’humanité » ? Seulement voilà, il faut bien manger aussi. Ne serait-il pas temps d’envisager un logiciel libre 2.0 plus équitable ou équilibré pour ceux qui le font et ceux qui l’utilisent ? Je vous renvoie pour méditation à cette interview de l’auteur d’une licence libre qui se voulait plus « équitable » : la licence LIANG. L’autre méditation concernera également le système monétaire dans lequel nous vivons basés sur un code propriétaire ou « privateur » qui n’aide pas non plus.
Pour rester détendu et « boire frais » sur ce genre d’articles, je vous ai mis un petit fond d’image pour le site spécial été. Tchin !
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Article original écrit par Philippe Scoffoni le 18/07/2013. | Lien direct vers cet article
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