Modèle de financement : Don, Prix Libre ou Payant ?
J’ai essayé de comprendre pourquoi Minecraft avait un tel succès commercial. Vendre un jeu continuellement à l’état de Beta, c’est a dire jamais testé avant la sortie, mais surtout engendrer suffisamment d’argent pour payer une équipe de développeur n’est pas à la portée de tous.
Comment dans cette optique ce jeu peut-il parvenir à se financer durablement ? Vu ses graphismes et sa stabilité, la concurrence devrait être plutôt rude !
Pour ceux qui ne connaîtraient pas Minecraft, c’est un concept qui fait uniquement appel à la créativité du joueur. Aucun autre artifice scénaristique n’est nécessaire, il suffi de laisser le joueur dans son univers pour qu’il parvienne à s’occuper tout seul.
Paradoxalement, des jeux Libres ont eu énormément de mal à rassembler des fonds. C’est dans cet excellent article -que je vous recommande de lire- que j’ai pu comprendre les effets du mode de paiement sur le retentissement d’un projet.
Quelle stratégie permet aujourd’hui de vivre d’un logiciel ou d’un service ?
Tout ne peux pas avoir un prix. Par exemple, les dons pour La Quadrature Du Net ne peuvent pas être valorisés. Chacun donne ce qu’il estime nécessaire.
Et un hébergeur de site web mutualisé qui souhaite être gratuit ? La réalité, c’est que la plate-forme coûte continuellement de l’argent pour exister, alors comment réussir à proposer un service citoyen (l’accès à la libre expression) sans pousser à la rétribution ?
=> Le système de prix libre se prête bien à ces deux cas de figure. À l’inscription, chacun passe devant la caisse et donne ce qu’il veut, même 0€. On est naturellement plus tenté de faire un micro-don que d’entrer « 0€ » et de profiter sans la moindre contre partie du temps et de l’argent dépensé bénévolement par d’autres.
Par opposition, le « tout gratuit » n’attire souvent pas l’attention des utilisateurs, alors que le « tout payant » les fait fuir.
Mais Minecraft, c’est payant non ?
J’observe que le sentiment « de participer à une grande cause » rend les gens enthousiastes. Minecraft a récompensé les « early adopters » par des prix bas et des comptes illimités à vie, pour encourager le décollage des ventes, puis a monté progressivement ses tarifs à mesure que le jeu devenait populaire.
Quelques exemples nous montrent d’abord que le don n’est pas un modèle efficace. L’argent se fait souvent attendre.
L’exemple de Minecraft montre également qu’un tarif fixe ne sert pas non plus les intérêts d’un projet. La course aux fonctionnalités a rendu Minecraft particulièrement désagréable à jouer car la priorité n’était pas de corriger les bugs, ce qui aurait été le cas si le code source avait été ouvert.
Le modèle « prix libre » me parait le plus contributif, c’est un choix honnête qui rappelle au consommateur l’existence du coût de production du service et que celui ci a besoin de moyens. Si l’accès aux sources permet de faire participer les gens, il évitera ainsi d’avoir à payer des employés : une communauté grandissante apporte avec elle son lot de contributeurs.
Les fausses promesses, le moteur du modèle Payant
Le modèle tout payant comme Minecraft me pose notoirement problème lorsqu’il est assorti d’une carotte de ce type :
« Si je vends x millions d’exemplaires, je libère les sources ! »
Quel intérêt apporterait la libération d’un jeu 5 ans après son apogée, lorsqu’il sera oublié de tous ? Voilà comment appâter le libriste.
Aujourd’hui, je me pose la question du mode de financement le plus pertinent. Le don est souvent mis en avant pour pérenniser un but alors que prix libre permet, à mon sens, de gagner raisonnablement de l’argent. C’est au bon vouloir, comme un don, mais peut être enrobé de quelques bonus ou de la reconnaissance visible. C’est comme cela que procède Blender, en vous proposant d’être dans le générique de leurs films d’animation.
Si le succès est au rendez vous, est-ce qu’un homme travaillant sur son temps libre peut légitimement toucher des millions à ne plus quoi savoir en faire, alors que son travail est comparable à un projet libre comme Tee World ? Il va sans dire que Tee World ne croule pas sous les billets, alors que le soin apporté au jeu est à couper le souffle.
En plus de cela, le modèle payant a l’inconvénient de faire apparaître de faux exécutables vérolés distribués aux quatre vents.
Suite et fin
Mon avis est que l’aspect contributif du Prix Libre valorise le travail régulier, l’écoute de la communauté, et permet de retirer de l’argent d’un projet qui se porte bien. Ce n’est pas toujours facile, il peut être intéressant de passer par le modèle Payant le temps de lancer son projet avant de l’ouvrir à tous. Cette ouverture est en général très appréciée, et encourage à utiliser l’argent reçu pour lancer d’autres projets.
Enfin, ce modèle permet aux utilisateurs de profiter sans attendre d’un logiciel complet ou d’un service de qualité, toujours en évolution, en encourageant l’aspect participatif. Ce que tue, à mon avis, le modèle tout payant.